Le plan du gouvernement pour développer les éoliennes ne prévoit pas de droit d’opposition pour les maires

La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a présenté hier les mesures choisies par le gouvernement pour « un développement maîtrisé et responsable de l’éolien ». Si un certain nombre d’entre elles semblent intéressantes, le droit de véto pour les maires, en revanche, ne semble toujours pas à l’ordre du jour. 

Voilà qui donne au moins une indication sur les intentions du gouvernement, à deux mois tout juste de l’examen du projet de loi 3DS à l’Assemblée nationale. Alors que les sénateurs ont introduit dans ce texte, en juillet, un droit d’opposition des conseils municipaux aux projets d’implantation éolienne, cette possibilité ne figure nulle part dans les propositions listées hier par Barbara Pompili.

« La seule solution » 

La ministre s’est livrée à un plaidoyer en défense de l’énergie éolienne, rejetant « la petite musique »  anti-éoliennes qui est « en train de s’installer dans notre pays (….) à renfort de contre-vérités ». Pour Barbara Pompili, il faut « le dire clairement » : « L’éolien est une énergie renouvelable, décarbonée et bon marché, qui a toute sa place dans notre mix énergétique. »  Elle a rappelé que le pays va faire face, dans les années à venir, à une explosion de la demande en électricité : voitures électriques, pompes à chaleur à la place des chaudières au fioul, production d’hydrogène… les modes de vie qui sont en train de s’installer – et sont largement soutenus par l’État – sont extrêmement gourmands en électricité, et la demande pourrait augmenter de 50 % d’ici au milieu du siècle. « La seule solution pour répondre à cette situation, a martelé Barbara Pompili, c’est de développer massivement les énergies renouvelables », et ceux qui disent le contraire font preuve « de malhonnêteté intellectuelle ». 

Il faut donc, selon le gouvernement, continuer de développer massivement la production d’électricité éolienne – qui ne représente aujourd’hui que 8 % de la production totale du pays. 

Un tiers des dossiers refusés

La ministre se dit toutefois consciente d’un certain nombre de difficultés et du « rejet »  que les installations d’éoliennes ont pu – et peuvent – encore susciter. Et elle reconnaît que parfois, ces contestations sont « légitimes » : « Regardons la réalité en face : aujourd’hui, dans certains territoires, nos concitoyens ne veulent plus des éoliennes. Lorsqu’ils vivent au milieu de dizaines d’éoliennes de plus de 100 mètres de haut, ils peuvent éprouver un sentiment compréhensible de saturation », d’autant plus qu’ils n’ont pas été « suffisamment consultés ». La ministre estime pourtant que la législation française est « l’une des plus protectrices d’Europe », et rappelle que depuis 2020, « un tiers des dossiers de demande d’autorisation »  a été refusé – pour des raisons esthétiques, ou parce qu’ils s’inséraient dans des zones déjà « très denses en éoliennes », ou encore pour des questions de protection des oiseaux. 

Lutte contre les nuisances

C’est pour aller plus loin que le ministère a élaboré les dix mesures présentées hier, dont la première est la demande faite aux préfets d’élaborer « une cartographie des zones propices au développement éolien ». Une mesure qui a un petit goût de déjà-vu, et qui rappelle les furieux débats autour de l’instauration, puis de la suppression, puis de la réinstauration et de re-suppression, dans les années 2010, des ZDE (zones de développement éolien). Les préfets de départements vont devoir cartographier leur département en « trois couleurs » : « Vert pour les zones où le développement de l’éolien apparaît encore souhaitable ; orange, là où il faut regarder au cas par cas ; rouge pour les zones où il n’est plus souhaitable. »  La ministre va également nommer un « médiateur de l’éolien », qui « pourra être saisi par les préfets dès l’instruction de projets potentiellement problématiques ». 

Concernant les questions de durabilité des équipements et de nuisances, la ministre a annoncé plusieurs changements importants : elle va instaurer, immédiatement, une obligation « d’excavation totale »  des fondations des éoliennes en fin de vie : « Les fondations en béton qui restent dans le sol une fois les mâts démontés, c’est fini. »  Le taux de recyclabilité des éoliennes va être porté tout de suite à 90 %, puis à 95 % en 2024. 

Pour ce qui est des nuisances sonores, « le contrôle du bruit sera systématique pour tous les nouveaux parcs »  à partir du 1er janvier, et en cas de dépassements des seuils, les préfets seront habilités à « réduire la vitesse des pales »  voire « exiger l’arrêt de l’installation si nécessaire ». Pour lutter contre les nuisances visuelles, la mesure expérimentale consistant à « orienter les faisceaux vers le ciel »  va être « généralisée », et les travaux vont débuter dès la fin de l’année. Une autre solution, plus complexe techniquement, va être testée prochainement et pourrait être généralisée en 2022 : elle consiste à « n’allumer les lumières (des éoliennes) que lorsqu’un avion est en approche ». 

« Information »  du maire

Toutes ces mesures sont intéressantes, mais elles ne règleront pas le sentiment, relayé par la ministre elle-même, d’une consultation insuffisante de la population. « Il est indispensable, a déclaré Barbara Pompili, que l’implantation d’un parc ne soit plus subie mais voulue par les citoyens ». 

Elle a rappelé que la loi Climat et résilience « renforce les obligations d’information des maires »  (lire Maire info du 17 septembre). « Obligations d’information », oui ; mais c’est quand même l’État, à travers les préfets, qui gardera la main pour dire oui ou non à un projet d’implantation. Car droit d’information n’est pas droit d’opposition, et le gouvernement a bataillé au Parlement pour empêcher l’introduction d’une telle possibilité de veto des maires dans la loi. Il reste aujourd’hui une mesure – qui entrera en application en février 2022 – imposant aux porteurs de projet de répondre aux « observations des maires », ce qui semble tout de même la moindre des choses. Hier, la ministre a émis le souhait que cette disposition entre en application avant la date prévue. Elle a également dit souhaiter « que soit généralisée la constitution d’un comité de projet autour du maire. Il permettra d’informer les citoyens très en amont et régulièrement sur le développement du projet, afin qu’ils n’aient plus le sentiment d’être tenus à l’écart de l’information. » 

Il n’est donc question, dans les projets du gouvernement, ni de permettre aux maires de refuser un projet, ni de demander formellement l’avis de la population. Le sort de la disposition introduite par les sénateurs dans le projet de loi 3DS, qui sera discuté en décembre à l’Assemblée nationale, semble donc scellé. Rappelons que les sénateurs ont prévu un dispositif donnant aux conseils municipaux trois possibilités face à un projet d’implantation d’éoliennes sur le territoire de leur commune : soit l’accepter, soit le refuser (ce qui bloquerait le projet), soit le soumettre à un référendum local. 

Il semble clair que ce dispositif n’a pas l’aval du gouvernement.

Le plan du gouvernement pour développer les éoliennes ne prévoit pas de droit d’opposition pour les maires | Maire-Info, quotidien d’information destiné aux élus locaux


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